Léna & Matthew

Matt venait tous les jours dans ce pub de Manhattan, depuis qu’il avait rencontré son ancienne amour de jeunesse, Katerina. Elle lui avait apprit que l’enfant qu’il avait eu avec elle, était elle aussi à NY. Elle lui avait aussi dit qu’elle venait quelques fois rendre visite à une de ces amis. Il commandait un grand café noir avec trois doses de sucre et s’installait à une table devant la porte d’entrée, pour être sûr de ne pas la manquée.

Et donc comme à son habitude il sirotait son café en feuilletant le Times du jour. Depuis qu’il avait appris la nouvelle concernant Léna, il avait prit conscience de la chance qu’il avait. Il avait ainsi prit la décision de ne plus penser au passé, aux problèmes qu’il avait rencontré avec la mère de sa fille, et de se tourner uniquement vers l’avenir. Un avenir qu’il espérait bien évidemment vivre avec sa fille. En temps normal, il buvait son café sereinement, attendant sans grand espoir. Mais quand elle entre dans le pub…

...son coeur double d’intensité. Il prend une grande inspiration et puise dans toutes ces forces pour ne pas la fixer. Il ne veut pas l’effrayer. Quand elle se met dos à lui, il reporte son regard sur elle. Il l’étudie sous toutes les coutures, ses cheveux, sa nuque, sa taille. Il prend une grande gorgée de café et décide sur un coup de tête d’aller lui parler. Que risquait-il après tout, Katerina lui avait dit qu’elle ignorait son existence. Il se lève et s’approche du comptoir, sa grande tasse de café à la main, et s’installe juste à côté d’elle. Il réfléchit à la manière de l’aborder et finit par voir un grand pot de sucre avec un bec verseur.

Bonjour, vous pouvez me passer le sucre s’il vous plaît ?

Léna & Matthew

Quand elle lui répond, il se bloque légèrement. Imaginé ce qu’il peut ressentir, c’est la première fois qu’il a la chance d’entendre la voix de sa fille. Il réagit quand elle lui envoie le pot de sucre. Pas question de replonger dans ses émotions.

Peu importe j’aime les deux. Par contre non, jamais de crème, je vous remercie.

Il renverse un peu de sucre, pas trop, il l’est suffisamment. Ce n’était qu’un prétexte pour lui parler, en y repensant c’était peut être pas la meilleure qu’il ai trouvé. Il tente un deuxième essai.

Je suis désolé de vous déranger à nouveau, voilà je suis arriver en ville il y a, bientôt trois semaines. Et, dites-moi Purple street c’est bien au nord de Main street ? Ou c’est au sud ? Je mélange toujours.

Léna & Matthew

Il rigole doucement à sa remarque sur la mode.
Oh mais c’est une question très importante et à ne pas prendre à la légère, ironise-t-il. Imaginez si demain une étudiante choisit une jupe courte alors que la mode est de la porter jusqu’aux genoux, ça serait vraiment catastrophique, non ?

C’est jamais beau à voir, quand un homme de quarante ans se met à parler mode à une jeune fille qui en a vingt. Surtout quand l’armoire du monsieur n’est remplit que de robes d’avocat.

Si c'est une question, je ne peux malheureusement pas vous répondre, ma connaissance de la géographie new-yorkaise en est qu'à ses débuts. D'où ma question...mais en effet, une recherche sur internet sera plus efficace.
Merci quand même, lui dit-il en russe.

Vous travaillez dans le coin ?

Léna & Matthew

Non du tout, aucun lien avec la mode, je disait juste ça comme ça. Je suis du genre pragmatique, les plus belles choses sont celles qui fonctionnent quand on leur demande. Et les fringues n’échappent pas à ma règle. Et je ne suis pas étudiant non, dit-il en souriant. Je travaille, je suis avocat. À Brooklyn, cabinet Spencer & Mills.

Quand elle lui répond en russe, il est très content que Katerina lui est apprise et qu’elle est gardée ces racines russes, elles sont très importantes pour Matthew. Il avait du mal à reconnaître des choses qui viendrait de lui, alors l’entendre parler sa langue maternelle, le rassura un peu. Même si la mère de Léna parlait elle aussi couramment le russe.

Vous apprit le russe avec vos parents ? Vous êtes assez typés de là-bas, vos parents y sont nés ?

Il connaissait bien entendu toutes les réponses, mais le son de la voix de sa fille lui faisait vraiment beaucoup bien. La voir ainsi pleine de vie lui faisait également très plaisir.

Léna & Matthew

Certes je n’ai pas l’air d’un étudiant, mais alors de quoi ai-je l’air ?

Je ne voulais pas être indiscret avec toutes mes questions, c’est que, vous avez l'âge de ma fille et elle me manque beaucoup.

Lors d’une audition et d’une plaidoirie, un avocat ne doit pas laisser le temps à un prévenu ou même à un témoin, de chercher ces réponses. Ainsi ce dernier, même si il ne cherche pas à mentir, est plus spontané et ces réponses sont plus proches de la vérité. D’où le rapide débit de parole.

Peut-être un amalgame de ma part quand je vous ai entendu parler russe, c’est vrai que les blondes dans votre genre peuvent venir de beaucoup de pays de Europe de l’est, en général.

Il prend une gorgée de café.

Vous pouvez vous permettre bien entendu. Je suis né là-bas également, tout comme ma mère, et donc je le parle couramment. Je suis de Saint-pétersbourg, mais ça ne se voit pas sur moi, car j’ai tout prit des racines irlandaises de mon père. Vous êtes nés où, vous ?

Léna & Matthew

L’entendre parler de son hypothétique fille lui envoie un petit pincement au cœur, mais il se force à lui décrocher un petit sourire forcé.

Je manquerais pas de lui dire. D’ailleurs, voilà je ne l’ai pas vu depuis ouah, une éternité et je ne sais pas par quoi commencer avec elle. Si vous étiez elle, qu’aimeriez vous entendre venant de son père ?

Quand elle parle de son amie, Matt tourne son regard vers la serveuse qui vague à son travail.

Oui, c’est toujours bien pratique pour garder vos secrets de jeunes filles. Méfiez-vous tout de même, de ne pas parler à côté de la mafia russe. Vous parlez d’autres langues ?

Elle lui parle de ses origines, et il a besoin de quelques minutes pour se rappeler la dernière fois qu’il était aller en Irlande.

Mes principales racines sont tout de même en Russie, je n’est jamais vécu en Irlande, la dernière fois où j’y suis aller, c’était quand j’avais douze ans, un bail donc. J’étais parti avec mon père rencontré le seul membre de ma famille encore présent là-bas, un oncle décédé depuis. Je crois qu'ils étaient lui et mon père de Galway, à l'ouest de Dublin, avant que ça devienne un piège à touristes et à étudiants européens. La seul tradition qu’il me reste, c’est les bières brunes.
La Russie ne vous manque pas trop ?

Léna & Matthew

Votre père n'est pas très attentionné avec vous ? Je vous rassure tout de suite, je ne suis pas avocat pour enfants maltraités.

Il sourit à ses remarques sur la mafia.
En effet, je pense aussi. Mais ce que je voulais dire par là, c'est que eux si ils peuvent vous comprendre, vous êtes donc potentiellement capable de les comprendre et donc de capter des choses qui peuvent s'avérer dangereux pour vous. Et c'est là que vous devez être prudente.

Si je parle celte, pourquoi croyez vous que je parle celte, ce n'est pas parce que je suis irlandais que je le parle, tous les italiens ne parlent pas latin, dit-il en se moquant gentiment. Mais sinon, j'ai des notions en grec et en arabe et moi aussi un peu de français.

Je pense qu'on puisse nos racines dans la famille présente dans ledit pays, mais quand il n'y a plus personne, je n'y voit pas l’intérêt. Pour les bières, je vais jouer mon irlandais un peu underground mais je préfère la Murphy's moins amère que la Guiness et la Beamish je la préfère en rousse. Vous buvez beaucoup de bière ?

Léna & Matthew

J’en suis sûr aussi, comment pourrait-on ne pas vous adorer. Mais si j’avais la chance d’avoir une fille aussi charmante que vous, je ne manquerais jamais de lui dire que je l’aime et que je suis extrêmement fier d’elle.

Il se retenait de plus en plus de ne pas lui dévoiler toute la vérité, mais Katerina avait été très clair avec lui, elle devait pour l’instant rester dans l’ignorance. Et il avait trouvé que c’était une bonne idée, mais tenir cette promesse avec elle en face de lui, serait de plus en plus difficile.

Vous savez je n’ai pas apprit l’anglais avec mon père, alors de là à ce qu’il m’apprenne le celte, chose que je ne suis même pas sûr qu’il connaisse lui même. Donc non je n’ai aucune connaissance dans ce dialecte. Pourquoi êtes-vous intéresser par ça ?

Il regarda les bières présentes sur les étagères derrière le bar.
Vous êtes une fille raisonnable ça se voit tout de suite. Vous êtes amoureuse en ce moment ?

Léna & Matthew

Ma fille, c’est...elle a beaucoup de points commun avec vous. Malheureusement, je n’ai pas eu la chance de la voir grandir. Je suis ici pour reprendre contact avec elle, enfin quand je dit ici, je veux dire à New-York. Le problème c’est qu’elle ignore mon existence et je doit attendre que sa mère lui en parle, on pense qu’elle le prendra mieux si c’est elle qui lui annonce.

En effet, l’apprentissage des langues à l’école n’est pas très adapter à son utilisation quotidienne. Moi, j’ai eu la chance de rencontrer une jeune femme qui m’a appris anglais il y a de nombreuses années, en Russie.

Quand elle sourit, il lui renvoie le même sourire.
Il vous traite bien ? Les jeunes hommes de votre génération sont parfois trop cavalier.

Matthew craignait de dévoiler son secret, il commença à se dire qu'il devrait peut-être arrêter cet entrevue et s'en tenir au plan qu'il avait planifié avec Katerina.

Léna & Matthew

Je ne suis pas peiner par vos questions, je sent que les choses vont prendre une bonne tournure avec elle.

Il lui sourit pour ne pas la faire culpabiliser. Quand elle lui demande son nom, il réfléchit longuement pour ne pas faire de gaffe. Peut-être connaissait-elle l’existence d’un garde du corps ayant servi il y a des années pour ”son père”, il préfère mentir.

Je m’appelle Ryan, dit-il en lui tendant sa main. Et vous ?

Ryan était le prénom de son père.

Oui, un peu plus d’une vingtaine d’année et je suis aux États-Unis depuis quinze ans, donc l’un dans l’autre j’aurais finit par la connaître.

Il fut rassurer d’apprendre que le copain de Léna, était tout a fait correcte avec elle.
Je suis heureux pour vous. À votre âge, on a des rêves plein la tête, quels sont les vôtres ?

Léna & Matthew

Effectivement, je veux que son bonheur même si j’espère aussi qu’il résidera dans le fait que je fasse parti de sa vie. Je pourrait concevoir qu’elle ne veuille pas de moi, elle a eu un père qui lui a déjà donner tout ce dont elle avait besoin.

Voilà, Matt replongeait dans ces vieux démons. Encore combien de temps, continuerait-il a craindre le rejet de sa fille ? Il fallait qu’il garde en tête que sa meilleure chance était de rester confiant.

Elle lui tend sa main et il la serra avec plaisir. Il a du mal à la relâcher, il aurait voulu la tenir des heures, des heures à lui caresser affectueusement sa peau si douce. Mais il trouve le courage de la lui rendre pour ne pas éveiller ces soupçons. Il la passe mécaniquement dans ses cheveux en regardant le bois du comptoir, il relève rapidement les yeux vers elle en les battant frénétiquement, quand elle lui demande la raison de son départ la Russie. Il réfléchit un certain temps, il pouvait lui raconter la vérité sans qu’elle se doute mais il ne voulait pas incriminer sa mère avant qu’elle ai eu le temps de se justifier.

Ce n’est pas indiscret. C’est à cause d’un amour de jeunesse qui s’est mal terminé. Ça peut paraître ridicule comme prétexte, mais je vous assure que c’était la seule solution que j’ai trouvé.

Il est surprit d’apprendre qu’elle soit si proche du mariage. Il ne se souvient plus si Katerina lui en a parler.

Oh je suis très heureux pour vous, vous avez prévu de vous marier cette année ? demande-t-il un grand sourire aux lèvres, très enthousiaste.

Léna & Matthew

Ça me fait plaisir à entendre, j’espère qu’elle aura le même état d’esprit quand elle apprendra la vérité.

Oui je suis d’accord, le tout n’est qu’il ne faut pas revenir trop tard.

Pourquoi ne prendriez vous pas les devants avec votre amoureux, si c’est vous qui lui fessiez la demande, ça serait original. Vous pensez qu’il pourrait accepter ?

Mes autres rêves...euh, j’aime le droit et mon boulot d’avocat, mais je ne suis pas tenter par ouvrir mon propre cabinet. Il réfléchit encore. Ah oui, voilà il y a cinq ans j’ai été blessé au genou gauche, j’en garde parfois un léger boitement. Avant ça j'étais passionner de cyclisme et j’adorais parcourir les plages de Californie à vélo, s’il y a quelque chose que j’aimerais pouvoir refaire, ça serait ça.

Il regarde sa montre. Il ne voulait pas partir, mais malheureusement sa tâche l'attendait et il savait qu'il aurait bientôt l'occasion de la revoir.

Mince, j'ai un rendez-vous dans une heure et je dois encore repasser à mon travail. J’aimerais beaucoup continuer discuter avec vous, mais je vais devoir vous laisser. Si vous êtes toujours dans les parages un de ces quatre, on pourra reprendre notre petit discussion.